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Auprès de mon arbre | Medea
Isaac G. Yuri
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Isaac G. Yuri



Auprès de mon arbre | Medea ♦
Mer 14 Avr - 2:57
auprès de mon arbre
Ft. Medea I. Kierkegaard

Réveil.



Perdu dans le vide, il divaguait.

«Apaisé. » Voilà le mot qui lui revenait sans cesse en tête, comme si à force de se le répéter avec tant de ferveur, il avait fini par effectivement faire effet.

Il respirait à un rythme précis, celui d’un exercice qu’on proposait aux individus souffrants d’épisodes traumatiques. Régulièrement, sa poitrine se gonflait d’un air nouveau, avant de laisser la bouffée salvatrice rejoindre la brise nocturne. Il était léger, pardonné de ses péchés, volontairement prisonnier d’une bulle de sécurité et de tranquillité.

« Inspirer. Quatre secondes. Expirer. Quatre secondes. »

Ses muscles paraissaient plus souples, ses épaules affranchies du fardeau qui les accablait d’habitude. Tout son être flottait dans cet océan de méditation, cette petite parenthèse dans le tumulte de la vie. Son sourire gagnant du terrain sur son visage d’albâtre, sa respiration délaissait progressivement le rythme millimétré de son souffle pour la normalité d’une sieste bercée. Dans une étreinte rêvée, il laissa son esprit rejoindre les nébuleuses, les étoiles scintillantes qui perlaient au sommet de l’arbre contre lequel il choyait.

Il était là dans un interstice débarrassé de l’illusion et de la déception, libre de ne montrer rien d’autre que ce qu’il ressentait réellement. A cet instant, il n’existait ni doute ni trouble, ni honte ni rejet.

Il n’y avait que lui et sa conscience, ce qu’il trouvait étrangement réconfortant, comme des retrouvailles avec un ami d’enfance ou un soutien trop longtemps délaissé. Plus besoin de cette pancarte d’indifférence qu’il brandissait dans l’espoir que personne n’ait l’idée de la retourner, plus besoin de ces plaisanteries ou de ces dérisions tout juste bonnes à détourner l’attention.

Isaac était alors vulnérable. Et c’était loin d’être un problème.

Égoïste, il resta dans ces bras réconfortants quelques longues minutes, souhaitant ne jamais avoir à les quitter. Néanmoins au bout d’un moment, il ouvrit les yeux. Comme à chaque fois.
Et comme à chaque fois, il se décevait de retrouver le monde qu’il avait quitté. Toujours là, à sa place.

« Hé bien ? » A peine revenu qu’il s’enquerrait déjà de son prochain, jetant un œil inquiet à la personne à sa gauche. Une main posée sur sa nuque tendue, il se redressa sur le drap qu’il avait étalé dans l’herbe. « Tout va bien ? »

Remarquant la confusion qui battait au creux du regard de son interlocutrice, Isaac se redressa davantage. In-extremis, il récupéra d’un geste héroïque la bouteille de vin qu’elle manqua d’échapper et renverser dans l’herbe. Fier de son exploit, le jeune homme adressa un clin d’œil comique à Medea, avant de réaliser l’inutilité de son geste, la faute à ses binocles.

« Je vous sens quelque peu… instable ? » Exprima-t-il d’une voix mesurée, soucieuse de ne pas aggraver un quelconque état de malaise. Maintenant assis, il balaya d’un geste négligé une mèche rebelle avant de sourire avec diligence.

Ce n’était pas la première fois qu’il était réveillé par le sifflement des problèmes.




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Medea I. Kierkegaard
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Auprès de mon arbre | Medea ♦
Jeu 15 Avr - 1:01

Je m’assoupissais, à mon tour, le dos reposant contre un arbre.
Le silence m’enveloppait tel une douce couverture, faite de sérénité. Exactement celle qui me manquait cruellement ce jour-là, dont j’avais terriblement besoin. Au fil des minutes, j’y succombais – la seule raison pour laquelle j’étais encore éveillée, était la présence amicale d’Isaac.

Mon regard se posa sur lui, pour la énième fois, alors que je luttais contre le sommeil qui alourdissait mes paupières. À l’image de ce lieu reposant, le jeune homme dormait paisiblement, à présent que ses démons avaient été éloigné par mes soins. En contemplant son visage endormi, je ressentais une pointe de fierté d’avoir su repousser les ombres, heureuse d’être parvenue à calmer ses cauchemars, soulagée d’avoir réussi à détendre ses traits. J’esquissai un sourire, le cœur rempli de joie face à ce nouveau succès - mais ce bonheur était éphémère.  
Un livre glissait sur mes genoux. Avant qu’il ne chute, je le ramenai à moi en soupirant doucement. Je l’avais amené en prévision de la sieste habituelle de l’étudiant, mais il peinait à rendre justice à son utilité. Ma vision se floutait dès que j’essayais de me concentrer sur ma lecture. C’était peine perdue. Je me frottai les yeux, dans l’espoir que ça change quoi que ce soit à leur état.

Cette soudaine fatigue s’abattant sur moi ne m’était pas étrangère, je l’avais déjà expérimenté à de nombreuses reprises ; le dénominateur commun étant l’utilisation abusive de mon pouvoir. Je n’en avais pas informé Isaac au préalable - probablement une erreur de ma part, je l’admets. Le risque qu’il préfère repousser notre rendez-vous était trop grand pour que je me le permette ; je tenais à lui rendre ce service, dès qu’il m’appelait.
Malheureusement, cette journée avait été éprouvante, au travail. Une jeune élève s’était blessée après avoir essayé - en vain – de faire usage de son don, et était arrivée en catastrophe à l’infirmerie. Il était hors de question que je la laisse dans un tel état de panique, ce qui a résulté en une petite séance d’hypnose improvisée, seulement quelques heures plus tôt. Devoir l’utiliser plusieurs fois en une seule journée, avec un si petit intervalle... était une très mauvaise idée.

Il ne me restait plus qu’à blâmer mes moments d’absences sur l’alcool... Ça me paraissait être un plan intéressant, jusqu’à ce que la bouteille de vin ne glisse entre mes doigts. Il aurait sûrement été plus sage d’attendre quelques instants, ne serait-ce que pour être pleinement consciente de mes gestes. À ma plus grande surprise, le drap sur lequel nous étions installés n’eut aucune tâche malgré ma maladresse.

Je battais des cils, bêtement, avant que la voix d’Isaac ne me parvienne enfin. Depuis combien de temps me parlait-il ? Non, plus important que cela... Je n’avais pas réalisé à quel instant il s’était réveillé. Il m’avait semblé avoir vérifié seulement quelques secondes auparavant... Ou était-ce quelques minutes ?

Je restai imperméable à son inquiétude, encore confuse de l’instant passé. Tout en soupirant d’exaspération, je secouai la tête en fronçant les sourcils. Il n’était pas supposé assister à ça. À ma faiblesse. Pas lorsque je prenais soin de sa vulnérabilité. Comment pouvait-il continuer à compter sur moi, si je ne restais pas un point d’ancrage sûr pour lui ? Je me mordis fortement la lèvre inférieure, ne trouvant pas de moyen de me sortir de cette situation délicate.

« De quoi parlez-vous ? La bouteille m’a simplement échappé, rien de particulièrement surprenant là-dedans. » Rétorquai-je, involontairement sèche. La colère que je ressentais envers ma propre personne se déversait dans mes mots, à mon insu. « Vous seriez surpris de toutes les maladresses dont je suis capable. »

Sans relever une seule fois les yeux vers lui, je repris la bouteille de sa main pour me verser ce fichu verre – que je vidais en une traite. Voilà qui remettrait peut-être les rouages en marche.
Je me réinstallai plus confortablement, le livre posé près de moi, et glissai machinalement une mèche derrière mon oreille – avoir le visage couvert par quoi que ce soit m’insupportait. Plutôt que de reporter entièrement mon attention vers Isaac, mes yeux se tournèrent vers l’horizon assombrie par l’heure tardive.

« Vous ne vous êtes pas reposé longtemps. Aurai-je été moins efficace ? » Demandai-je d’une voix claire, essayant de ne pas lui faire ressentir l’inquiétude qui me rongeait actuellement l’estomac.

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Auprès de mon arbre | Medea ♦
Jeu 15 Avr - 2:12
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Confus.



L’instant d’éternité qu’Isaac s’apprêtait à capturer s’enfuyait effectivement sous ses yeux. Aussi rapidement qu’il était venu, il disparaissait, laissant sa place aux nuages gorgés de pluie qui s’aggloméraient par-delà la cime du vieux chêne. Le moment devint fugace, déjà réduit au statut de simple souvenir, emporté comme les souffles paisibles qui faisaient vaciller le jeune homme vers l’inconscience.

Néanmoins difficile à rassasier lorsqu’il était question d’inconscience, voilà que dans sa désuétude le psychologue était paradoxalement désemparé, à l’affût. D’un œil tantôt inquiet, tantôt confus, il guettait l’infirmière, suspendu à ses réactions, voué à ses silences.

Aussi étrangement que cela était, Isaac sentait que quelque chose n’allait pas, que cette absence n’était pas qu’une ellipse, pas qu’un battement de cil maladroit.

Par respect il n’en fit toutefois pas mention. Ses mots restèrent pudiques sur le fil de sa langue comme l’étaient les émotions qui luisaient derrière la fenêtre opaque de ses binocles.

Il concéda finalement, rechignant toutefois à l’idée de faire confiance à Medea, d’étouffer l’incident derrière une simple maladresse déshonorante. Comme souvent, c’est derrière l’humour qu’il trouva le remède à son impuissance, la porte de sortie à l’embarras naissant qui réveillait l’angoisse qu’il était pourtant venu chasser.

« Oh ? Non, ce n’est pas de votre faute. » Si son sourire n’avait jamais quitté sa trogne, il paraissait maintenant un poil crispé. Il n’était pas dans sa nature de mentir, il n’y avait que lorsqu’il estimait ses fadaises plus réconfortantes que la réalité qu’il s’y résignait. « Vous êtes la dernière personne que j’aurais imaginé maladroite, Medea. » S’empressa-t-il d’ajouter, pour changer de sujet.

Achevant de se redresser, il s’installa face à l’infirmière, mimant de détourner le regard pour lui éviter un quelconque désagrément. De deux doigts, il pinça la branche de ses lunettes pour les retirer, rendant ainsi évident la direction dans laquelle il observait ; le plus loin possible.

Peut-être qu’elle respirerait plus librement si elle se savait épargnée par l’attention de l’étudiant, peut-être que ses mots paraîtraient moins secs s’il lui laissait le temps de s’humidifier les lèvres.

« Vous savez. » Le silence devenant pénible, il se résolut à le rompre. « Ces séances me sauvent la vie, mais je ne veux pas qu’elles entravent la vôtre. Si jamais vous en souffrez, nous pouvons décaler. Si c’est autre chose qui vous taraude, alors vous pouvez m’en parler. » Toujours sans la regarder, Isaac lui offrait son aide. En bon pénitent, il semblait avoir totalement occulté la froideur des mots qui lui avaient été adressés.

De toute façon, il était habitué.

« Je ne pourrais sans doute pas vous hypnotiser, mais je connais quelques tours de magie. » Un petit rire dérisoire alla souligner le ridicule de la proposition, ouvrant la voie vers la véritable question. « Ce que je veux dire, c’est que ces séances n’ont de valeur que si elles peuvent être retournées. Si jamais un quelconque poids venait alourdir vos épaules, m’autoriserez-vous à vous rendre la pareille ? »

Au fond de lui, il espérait que ces tournures alambiquées et ces mystères qu’il refusait de rendre explicites ne le trahiraient pas. Qu’on cesse de voir l’offense d’une main tendue.




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Auprès de mon arbre | Medea ♦
Jeu 15 Avr - 23:46


L’alcool se répandait dans mes veines au fil des mots d’Isaac, me rendant inapte à comprendre d’où venait la boule qui se formait dans ma gorge, ni ce qui rendait ma vision si incertaine et troublée. Je ne me risquai plus à bouger, par crainte qu’il ne soit révélé à son regard affûté les légères secousses dont mon corps était prisonnier. Un sentiment profond de défaite pesait au fond de mon ventre, écœurée de l’avoir laissé tomber – il n’en disait toutefois rien, mais c’était une évidence pour moi.
Différemment de ma pensée coupable, Isaac n’usait que de bienveillance à mon égard, son sourire audible au travers de ses mots. Il débordait de bonté et, de mon côté, j’étais incapable d’y répondre favorablement. Cet échec me restait en travers de la gorge. Plutôt que d’être soulagée par ses paroles salvatrices, je n’en ressentais qu’une honte plus intense.

Sur mes lèvres se dessina l’esquisse d’un maigre sourire, cette faible courbe puisant directement dans la source de mon malheur actuel. Soustraite à son regard, je permettais à mes traits de se tordre sous l’humiliation que j’éprouvais, celle-ci même qui rendait chaque battement de mon cœur plus lourd, et douloureux.

Comment étais-je passée de l’aide à la demoiselle en détresse ?

De longues secondes s’écoulèrent suite à sa grâcieuse proposition durant lesquelles je demeurais silencieuse, aucun mot ne parvenant à passer les barrières solides de mes lippes, se noyant plutôt dans les larmes que je ne versais pas. La boule qui bloquait ma gorge prit quelques instants pour disparaître, laissant derrière elle un goût amer sur ma langue que j’expirai alors d’un profond soupir, mes épaules s’affaissant dans l’abandon de ma fierté.
Avec lenteur, mes mains se levèrent pour remettre un semblant d’ordre dans mes cheveux – un laps de temps ridicule qui me donnait l’occasion de relever naturellement les yeux vers lui. Il n’y eut qu’à cet instant que je réalisais l’absence des lunettes sur son nez. Je m’étais tant habituée à ne pouvoir croiser l’océan clair de ses yeux que j’eus comme un choc de ne plus être confrontée à l’obstacle sombre.

« Avoir accès aux fenêtres de votre âme me donne l’impression d’être face à un étranger, » soufflai-je sur un ton plus léger, ma fatigue pouvant s’entendre bien plus nettement désormais que je ne cherchais plus à la dissimuler. C’était une phrase inutile, ne répondant en rien à sa généreuse offre – elle restait nécessaire, quelque part, pour m’aider à délier ma langue. J’espérais simplement qu’il ne me tiendrait pas rigueur de tout ce temps envolé à m’attendre.

Inconsciemment, je ne le lâchai plus des yeux. Était-ce encore à cause de cette nouveauté sur son visage, ou bien était-ce pour dignement lui faire face, sans me cacher derrière une quelconque façade ? Être ainsi fascinée par autrui n’était pas une habitude – ni aujourd’hui, ni jamais.

« Mon intuition n’était donc pas erronée... C’est la peur que vous ne vouliez décaler qui m’a empêché d’être honnête avec vous – c'était une erreur, je le reconnais. » Il ne m’avait jamais sied d’être cachotière, aujourd’hui n’en était qu’une nouvelle preuve. Pendant un instant, je détournai le regard pour observer le lointain, délaissant petit à petit du poids qui rendait mes membres tremblotants. « Je n’ai toujours aspiré qu’à aider mon prochain, alors il m’est difficile de concevoir l’idée de me donner la priorité lorsqu’on me demande de l’aide. »

Les mains jointes sur mes genoux, je soupirai doucement en me sentant plus légère de partager cette vérité. Mon regard descendit sur mes doigts abimés par les nombreux accidents causés par ma maladresse – les petites cicatrices n’étaient visibles qu’à celui qui les cherchait, mais elles n’en restaient pas moins présentes, symbole de mon inaptitude à gérer les contrecoups de mon pouvoir.

« Vous inquiéter, Isaac, aurait été contre-productif à ma présence. Mais... Il semblerait que j’ai échoué à garder ce sentiment loin de vous, n’est-ce pas ? »

Je coinçais ma lèvre supérieure entre mes dents, en proie à une nouvelle vague de honte. Pour la combattre, j’inspirai profondément en abaissant les paupières. Il ne me restait plus que quelques paroles à prononcer, ça ne devrait pas être si insurmontable. Je pris une pause avant de reprendre, répondant finalement à sa requête :

« Jusqu’ici, je n’ai cherché qu’à apporter mon aide. Il ne m’est jamais venu à l’esprit d’en demander à mon tour. Cependant je serai... » Un léger sourire chercha à faire son chemin jusqu’à mes lippes. « … ravie de pouvoir compter sur vous en retour, Isaac. »

Maintenant, je me sentais mal d’avoir ainsi alourdi l’atmosphère. D’un petit haussement d’épaules, je me permis de relancer sur autre chose, et démontrer que je n’étais pas dans une détresse si profonde que cela :

« Et vous êtes trop aimable... Si vous m’aviez vu, plus tôt, vous n’auriez pas tenu le même discours à propos de ma maladresse ! Croyez-le ou non, je suis parvenue à renverser un casier entier, après avoir trébuché sur mon propre pied... »

Je grimaçai à ce souvenir. Ma cheville s’en souvenait tout aussi douloureusement.

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Auprès de mon arbre | Medea ♦
Ven 16 Avr - 1:10
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Psychologie.



L’éclaircie arriva plus vite qu’il ne l’avait prévu, ou peut-être était-ce les restes de son optimisme qui lui faisait voir les lueurs radieuses de l’aube alors même que le soleil lui tournait encore le dos.

Fuyaient les nuages, perçaient les lances de lumière et souriait Isaac qui abordait cette conversation avec une assurance qu’il témoignait rarement.

Il se sentait bien, et c’était à Medea qu’il le devait. Bien plus que par la grâce de son hypnose, l’esprit du jeune homme avait été débarrassé des cauchemars poussiéreux qui s’y agglutinaient. Alors qu’il achevait de se réveiller et reprenait pleinement possession de ses moyens, il comprit quelque chose de décisif.

L’infirmière ne l’aidait pas à dormir, elle l’aidait à rester éveillé.

Éveillé, lucide, compréhensif. Au monde qui l’entourait, au contrôle qu’il manquait cruellement, à cette sagesse qu’il n’avait que de façade. L’esprit préservé des vagues qui venait le ciseler, il se mit à acquiescer comme un élève apprenant une leçon, bercé par les flots salvateurs de la guérison.

A cet instant, il lui aurait été impossible de dénigrer la vie, de laisser le pas à son autodestruction habituelle. Il n’y avait ni mauvais souvenir, ni insomnie glaçante. Ses jambes étaient légères, son cœur si paisible qu’il le sentait à peine. Il réalisa alors qu’il était celui qui ouvrait la porte aux démons venant bourdonner dans ses oreilles, que s’il cessait de leur donner de l’importance, ils disparaitraient tôt ou tard.

Si plutôt que de regarder le futur avec la crainte que ne s’y réitèrent les événements passés il voyait en l’avenir la promesse d’autres soirs comme celui-ci, alors il savait qu’aucun cauchemar ne serait assez perfide pour changer son allégeance. Si plutôt que de craindre qu’on détruise son bonheur il apprenait à le construire et à le rendre stable, alors aucun cyclone ne le ferait jamais chavirer.

L’étudiant soupira un instant. Il savait ces belles pensées éphémères, qu’il ne s’adressait là que de vaines résolutions qu’il délaissera au premier frisson.

Peut-être un jour sera-t-il assez valeureux pour se regarder en face. Pour l’heure, il s’échoua dans l’herbe, laissant sa tête choir contre les lames vertes qui lui chatouillaient les pommettes. Glissant une cigarette entre ses deux lèvres, il contemplait dorénavant le ciel étoilé. Son sourire ne cessait de croître à mesure que les mots de Medea laissaient leur empreinte, tant que finalement, il laissa même échapper un éclat de rire.

« J’espère que le casier va bien. » Dit-il avec une ironie amicale, s’amusant à faire rouler la cigarette entre ses lèvres sans l’embraser pour autant. « Votre pied aussi, bien sûr. » Il s’empressa de compléter, de peur de s’attirer les foudres de la seule personne qui pouvait éclaircir les cieux.

Croisant les bras derrière sa nuque, il reprit d’une voix plus claire, moins propice aux plaisanteries.

« Vous pouvez compter sur moi, bien sûr. A dire vrai vous le pouviez déjà avant, mais content que ce soit enfin acté. Vous faîtes beaucoup pour moi, il me paraît normal de payer ma dette. » Il haussait des épaules, le calme placide de son visage ne trahissant rien du chaos qui gangrénait son esprit la seconde d’avant. Isaac semblait simplement fidèle à lui-même : tranquille, souriant. Rassurant.

« Votre quotidien vous draine déjà suffisamment, nul besoin de repousser vos limites pour me porter secours. Je ne suis pas la plus empotée des demoiselles en détresse que vous devez sauver. » Là encore, il s’autorisa un rire devant l’absurde de sa palabre. « Je préfère l’entraide à l’abnégation, autorisez-vous donc à être la priorité, ne serait-ce que quelques instants. »

Les yeux toujours découverts, plus rien ne filtrait la bonhomie qui émanait d’Isaac. Allongé à la transversale, les jambes dépassant amplement du drap qu’il avait étalé au préalable, il avait des airs d’artiste transi, la cigarette remplaçant le brin de paille.

« Je viens vous voir lorsque les nuits ne se montrent pas clémentes. Peut-être pourriez-vous venir me voir lorsque vos jours s’avèrent tyranniques ? Avec un peu d’effort, nous bannirons les mauvaises journées en moins de deux. » Proposa-t-il, complice. Cette fois toutefois, il s’autorisa à tourner le visage vers Medea, pour prendre la température.

« De quoi préférez-vous parler ? De vos histoires maladroites ou de ce qui semble vous travailler ? » D’un air décidé, l’étudiant extirpa la fameuse cigarette de ses lippes, la rangeant dans sa poche.

Tout n’était peut-être pas perdu pour lui.




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Auprès de mon arbre | Medea ♦
Dim 18 Avr - 2:07


Posant ma main sur mon cœur, je soupirai de soulagement à l’écoute du rire d’Isaac. L’ambiance, entre nous, avait toujours été de cette légèreté ; c’était ainsi que j’appréciais le temps que nous passions ensemble, peu m’important l’utilisation fréquente de mon don.
Il m’était aussi doux qu’une tasse chaude de thé à l’orange et à la cannelle m’était réconfortante. Était-ce étrange, de le comparer à un parfum de thé ? À ma prochaine tasse, il était évident que l’étudiant serait dans mon esprit - ça ne me contrariait pas, il était toujours une agréable pensée.

Ses mots m’offraient néanmoins matière à réflexion, sur nos natures respectives notamment. Je décelai une part semblable à la mienne, dans ce qu’il m’autorisait à voir de lui, mais était-ce assez pour nous proclamer similaires ?
Il était également une évidence sur notre plus grande différence ; il était ouvert sur l’expression de sa bienveillance, lorsque la mienne était cachée dans mes actes plutôt que dans l’aspect de ma personne. J’éprouvais une pointe de jalousie face à cette capacité d’exprimer son ressenti par le biais de ses traits.
Son éclat de rire le prouvait. De mon côté, je n’étais capable que d’ébauches et d’esquisses. Avais-je déjà été prise d’un fou rire auparavant ? Avais-je déjà haussé le ton ?

Ce serait toutefois une erreur de le réduire à son visage expressif, comme c’en était une de me définir par mon faciès terne.

Isaac m’offrait ensuite la possibilité d’être égoïste, sans conséquence, et je peinais à l’accepter. Ce serait aller sciemment à l’encontre de mon essence, de ce qui régit mes actes et domine mes pensées.
Je m’étonnai cependant de réaliser que c’était un conseil qu’il m’était déjà arrivé de donner, et que je donnerais encore demain. Pourquoi ne pouvais-je pas le suivre, s’il m’avait l’air si juste ? Cette question me rendit terriblement confuse.

Je levai une main pour la poser contre mes lèvres alors que je basculai vers une réflexion plus intense, uniquement interrompue par le regard du jeune homme. Encore une fois, je me surpris à papillonner bêtement des cils, à la différence que cette action était due à l’étrange impression que ses yeux me procuraient.
Dès qu’ils étaient posés sur moi, sans la barrière de ses lunettes, je ressentais l’inconfortable sensation d’être épiée au plus profond de mon être ; que mes secrets les plus enfouis étaient à sa portée. Je ne m’en détournai néanmoins pas, le considérant à mon tour d’un regard neutre – tout du moins aussi neutre que le jade froid de mes yeux me le permettait.

«  Involontairement, vous venez de mettre le doigt sur quelque chose d’important, dont je n’avais pas conscience jusqu’à maintenant. » Lançai-je en secouant légèrement la tête, l’esquisse d’un sourire s’invitant sur mes lèvres. Je tapotai mes doigts dessus pendant que je songeai au problème auquel il venait de me confronter. «  En réalité, ces deux sujets que vous mentionnez... Ils sont intrinsèquement liés. À force d’utiliser mon hypnose, je suis de plus en plus instable ; aussi bien physiquement que mentalement. Étant donné que je m’en sers quotidiennement, j’en ressens les effets secondaires tous les jours à quelques exceptions près. »

Suite à cette maigre explication, je me resservis du vin – que je boirai doucement, cette fois. Cette pause m’accordait un instant pour peser mes mots, ainsi que lui donner le temps de répondre s’il avait un quelconque avis à me partager.

«  Ce à quoi vous avez assisté aujourd’hui, n’est que le résultat de l’abus de ce don, dans la même journée. Je suis épuisée. Et... » J’hésitai à prononcer la suite, comme si lui faire part de ce dilemme revenait à lui donner les clefs de mon jardin secret. «  Peut-être ai-je tort, de donner tant de ma personne, de ne jamais rien attendre en retour, et d’accepter ces difficultés permanentes. »

J’inclinai la tête, les yeux posés sur le verre entre mes doigts, et me questionnai sur la limite que pouvait avoir une telle discussion. Je me livrais à lui, comme il se livrait à moi pour que je rende son repos plus doux. Que pouvait-il faire pour moi, en retour ?

« En même temps, je ne peux envisager de renoncer à qui je suis - même en diminuant mes efforts, ça me paraîtrait être une trahison envers moi-même, » soufflai-je finalement, réaliste quant à mon incapacité à prendre soin de moi avant autrui. Est-ce que mon amour pour mon prochain me menait à ma perte ?

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Dim 18 Avr - 3:47
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Faux-prophète.



Plutôt que d’y mettre une cigarette, c’est son pouce qu’Isaac coinça entre deux incisives. L’esprit toujours en stase, bercé par la contemplation du ciel étoilé, il réfléchissait aux mots de Medea. Il les accueillait volontiers, se surprenant même à y trouver du réconfort. L’infirmière était un modèle de droiture et d’altruisme, ce qu’elle ne montrait au final qu’assez peu. Un ange gardien qui s’ignorait.

L’étudiant y trouva quelque chose de cruel, une allusion à une triste fatalité. Il n’y avait rien de plus navrant que le fait d’être le spectateur de sa propre vie, qu’à défaut de pouvoir vivre pour soi, il fallait vivre pour autrui en espérant que cela suffise.

Cela ne suffisait jamais. La vie était un précieux cadeau, et si préserver celle d’autrui était une tâche bénie, le faire au prix de sa propre existence était une fausse bonne idée.

A force de ne vivre que pour les autres, on oublie de vivre pour soi. A force de constamment porter assistance, on oublie comment demander de l’aide. A force d’aider chacun à se débarrasser de ses problèmes, on oublie ceux qui encombraient déjà notre esprit.

Si Isaac avait tendance à se considérer comme un pèlerin, il voyait dans le sacrifice quotidien de l’infirmière quelque chose de véritablement angélique. Elle était tant concernée par le sort d’autrui qu’elle ignorait ce qui planait au-dessus de sa tête. Tant occupée à baisser les yeux et plonger pour secourir les désireux qu’elle ne savait plus relever le nez et sortir la tête hors de l’eau.

Le léger craquement de l’ongle qui se fissurait sous un coup de dent un peu trop rageur, l’étudiant revint à lui, sourcils haussés. Soudainement inquiet, il remarqua que tout ce qu’il devinait chez Medea pouvait également s’appliquer à lui.

Que toute sa vie il n’avait eut que le second rôle.

Le réaliser si abruptement le fit grimacer. Il détestait de voir l’embarras que la situation de l’infirmière lui imposait, mais haïssait plus que tout le fait d’être finalement dans le même bateau, d’être impuissant et à court de remèdes. Dans son mépris envers lui-même, il haussa une épaule. Quelle piètre personne pouvait-il être.

S’il savait son embarcation vouée aux abysses, il se promit toutefois d’assister celle de sa voisine. Il s’efforça ainsi d’ignorer cette petite voix qui commençait à murmurer.

« Vous savez, pour donner de votre personne, il faut qu’il y ait une personne à la base. » La voix un poil plus rauque, l’étudiant faisait de son mieux pour éviter que la compassion qu’il ressentait ne fasse bouillir les vagues qui s’agitaient dans son regard. Faisant fi des tribulations – qui décidément ne cessaient de réattaquer, il se redressa sur son fessier, désormais face à Medea.

« Si vous donnez sans rationner, sans jamais ‘ refaire vos stocks ‘, tôt ou tard, il n’y aura plus rien à donner. Comme si vous vouliez nourrir tous les affamés du monde. Tôt ou tard, vous n’aurez plus assez et il faudra puiser dans vos réserves. » Le mot ‘ réserve ‘ lui paraissait adéquat. Le doigt occupé à arracher quelques lames d’herbe, Isaac en oublia de boire – ce qui était inquiétant.

« C’est peut-être pour ça que vous vous sentez ainsi ? Car vous donnez plus que ce que vous pouvez offrir ? Si, au final, vous aussi vous avez besoin d’aide, est-ce vraiment vous trahir que de prendre soin de vous ? »

En bon conseiller, il laissa la question en suspens assez longtemps pour qu’elle perce la curiosité de son interlocutrice. Se blottissant dans le silence pour encore quelques secondes, il rapatria son regard vers l’arbre dont le feuillage leur offrait toujours un merveilleux cocon. Respirant calmement, il mit ses angoisses personnelles sous le tapis, encore une fois. Son sourire réapparut alors ; pur et honnête.

Un sourire adorable qui n’avait rien à cacher, irradiant d’une lumière chaude et confortable. Celle d’un phare qui s’érigeait dans la nuit et offrait une alternative aux âmes égarées. Celui du refus de la morosité, qui en avait assez de se morfondre et de voir le verre à moitié vide.

« Si maintenant, je vous donnais la possibilité de faire absolument ce que vous voulez, que feriez-vous ? » Demanda-t-il alors en brusquant ce silence qui seyait pourtant tellement bien. Un léger bruissement soulevant une de ses mèches d’albâtre, Isaac s’amusa de la curiosité qu’il espérait bien faire naître. « Quelque chose rien que pour vous. En faisant abstraction du reste. Du temps, des conséquences, du devoir, tout. Juste, vous et un désir, un vœu que vous pouvez exaucer, un souvenir que vous pourriez créer ? »




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Medea I. Kierkegaard
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Auprès de mon arbre | Medea ♦
Jeu 22 Avr - 5:40

Les mots d’Isaac avaient un fond de vérité plus profond que je ne l’aurais pensé au premier abord. Ils pénétraient ma conscience pour en extirper des pensées nouvelles, me poussant à la réflexion, à me remettre en question. J’acceptais à contrecœur la direction que prenait la discussion, malgré en être devenue le sujet principal – loin d’y être habituée, je me sentais légèrement mal à l’aise.
Plutôt que de me concentrer là-dessus, je portai mon attention sur les questions posées. Je fus rassurée qu’il me donne volontairement un temps de réflexion, autrement il aurait dû attendre que je me décide à parler. Sur le moment, aucune réponse ne me semblait adéquate alors je restai silencieuse à observer le vide.

Je ne relevai la tête qu’à sa nouvelle interrogation qui fut particulièrement surprenante. Les mots me manquaient pour exprimer mon ressentis. Il touchait des cordes sensibles dont je n’avais pas réellement conscience jusqu’à présent - à moins que la vérité se place ailleurs, que je n’avais fait que détourner le regard, prétendant n’avoir aucun souci à régler.
Isaac me plaçait face à des problèmes que j’avais si longtemps ignoré. Comment réagir à ça ? Je n’avais pas encore eu le temps de digérer le reste qu’il me présentait une nouvelle problématique. Dans ma poitrine, mon cœur battait à tout rompre, ne sachant plus vers quoi se tourner. À quoi devais-je consacrer mes réflexions ?

« Je ne sais pas... » Murmurai-je, les yeux grands ouverts, probablement trop bas pour qu’il puisse m’entendre. Le silence des environs suffisait certainement à porter le son de ma voix jusqu’à lui sans effort de ma part.

Ma réponse était honnête, plus qu’elle n’en avait l’air. C’était aussi ce qui m’affligeait tant à cet instant, marquant mes traits d’une cruelle confusion. Mon esprit se vidait alors qu’il aurait dû s’emplir d’une multitude de pensées diverses. La question d’Isaac évoquait le voyage de l’esprit à travers les désirs secrets du cœur. Le mien se bloquait, comme s’il se confrontait à un mur infranchissable, comme si ce qu’on lui demandait lui était tout bonnement étranger.
Au fil des secondes, ce n’était plus une simple confusion qui empoisonnait mon cœur, mais une véritable tristesse. Les lèvres pincées, je me retrouvai à fuir le regard posé sur moi, comme si j’en étais subitement devenue indigne d’intérêt.

« Depuis mon entrée à Swish, je me suis pleinement consacrée à mon but qu’était devenir infirmière. Je ne m’en suis que trop rarement détournée. » Cet aveu me coûtait. Il était toutefois nécessaire afin de comprendre ce qui m’empêchait de répondre à sa demande. « Je ne me suis pas laissée d’occasion pour m'épanouir convenablement, que ce soit en nouant des amitiés, ou en explorant de potentiels passe-temps. »

Je n’en avais pas. Pour ce qui était des amis, je n’en avais qu’une poignée, sans exagération. Face à cette consternante réalisation, mes yeux alors tournés vers l’herbe verte s’embuèrent de larmes. Ce que je retins, finalement, de cette conversation était la question suivante : qui étais-je ? Au-delà de mon désir d’aider autrui, de ma froideur apparente, de mon manque de patience... Qui étais-je ?
Remarquant que je perdais mes moyens, notamment devant quelqu’un, je fis mon possible pour me calmer. J’inspirai alors profondément, empêchant les perles salées au coin de mes yeux de rouler sur mes joues, une main finissant par masquer une bonne partie de mon visage – je ne voulais pas me montrer sous un aussi mauvais jour à Isaac. Ni à qui que ce soit d’autre.

« J’aimerai découvrir qui je suis, » finis-je par souffler d’une voix si faible qu’elle se brisa.

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Isaac G. Yuri
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Auprès de mon arbre | Medea ♦
Jeu 22 Avr - 7:25
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Silence.



Isaac était de ceux qui pensaient qu’un silence pouvait être éloquent. Qu’il se cachait dans le regard et dans la respiration au moins autant d’indices qu’à travers les mots. C’était indéniable, ce que la langue refusait d’exprimer, généralement l’œil le faisait transparaître.

Toujours allongé dans l’herbe, l’étudiant refusait pourtant d’observer Medea. Ce n’était pas par manque de curiosité ou par manque de considération, simplement par respect envers la situation. Parfois le meilleur moyen de rendre un silence utile était de ne pas le briser. Parfois le meilleur moyen d’aider quelqu’un était de le laisser en proie à ces instants où il était face à lui-même.

Ainsi, le psychologue restât muet tout du long, son visage tourné vers les cieux et son éternel sourire toujours bien en place. Rien n’avait changé, et rien ne changea. Ni la bienveillance qu’il émanait, ni la tranquillité dans laquelle il baignait.

Point de jugements, point de regards honteux, point de non-dits douloureux.

Seulement Isaac, qui écoutait avec compassion. Respectant le temps dont l’infirmière avait besoin, respectant la pureté de l’instant qu’il ne fallait pas brusquer, respectant la pudeur d’une personne qui n’avait probablement pas en tête de se dévoiler ainsi.

Cette vulnérabilité là, ce n’était pas à lui de décider quand il l’observerait.

S’amusant à rouler un bout d’herbe arraché au sol entre ses lippes, l’étudiant attendit patiemment que le calme revienne, bien conscient que la retenue appelait la retenue. Au bout d’un moment, il jugea le moment opportun et reprit d’une voix jouette, presque comique.

« Pour être honnête, je crois que la seule chose que j’aurais eu à répondre à cette question à cet instant aurait été… » Sa dernière syllabe prolongée par un long râle d’interrogation, il entreprit de répondre à la question qu’il avait posée, confessant par la même son incompétence. « Une glace à la vanille. J’adore la vanille. »

Il acquiesça. Sûr de lui.

« Je crois que ma réponse est moins bonne que la vôtre. » Dit-il avec juste ce qu’il fallait d’auto-dérision, se prenant à ricaner de lui-même. « Voyez, je crois que je ne suis pas assez courageux pour partir du principe qu’un de mes désirs peut être basé sur le long terme. Ça impliquerait d’avoir à rester là, de maintenir le cap et de rendre honneur à ce vœu. Je ne peux que penser à quelque chose qui me ferait plaisir dans l’instant, et que pour l’instant. Une glace. »

Haussant des épaules, il avait cessé de rire malgré le rictus plaisantin qui demeurait au milieu de sa trogne. « Vous avez au moins réussi à vouloir quelque chose d’utile. Et cela m’arrangerait d’ailleurs beaucoup que vous l’obteniez, puisque j’ai également envie de vous connaître. »  

Fier de son don pour rendre les situations tendues plus légères et abordables, il pivota sur le ventre et déposa son menton au creux de son coude. De nouveau prompt à observer Medea directement, il la regarda d’un œil complice.

« Au moins, je pense que nous pouvons être sûr d’une chose. Vous avez effectivement besoin de prendre du temps pour vous. Êtes-vous toutefois certaine de ce que vous affirmez ? » Il s’interrogeât sincèrement.

« Vous êtes ici depuis plus longtemps que moi. N’avez-vous personne à qui parler ? Quelqu’un avec qui il vous est possible de rire, de vous détendre. Peut-être un partenaire, un collègue, un correspondant. Vous protégez les gens et vouez votre vie à leur bien-être, vous êtes sûrement plus aimée et importante que vous ne le pensez. » Reposant sa bouille dans le plat de sa main, il ignora bien rapidement les potentielles tâches qu’il imposerait à son pantalon.

« M’autoriserez-vous à découvrir qui vous êtes ? » Une dernière question vint rompre sa posture. Il appréciait déjà beaucoup Medea, le fait de savoir qu’il y avait plus de choses à découvrir n’était qu’une excellente nouvelle à ses yeux.

La voir s’épanouir devint presque instantanément un des objectifs d’Isaac, qui trouva en l’infirmière une nouvelle patiente.

Quoiqu’en vérité, il la voyait plutôt comme une amie précieuse.




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Medea I. Kierkegaard
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Auprès de mon arbre | Medea ♦
Lun 26 Avr - 9:50
Isaac était pareil à une bouffée d’air frais. Il ne s’arrêtait pas à mes excès d’émotion, ne se sentait pas obligé de me consoler avec de vaines paroles et des gestes indésirés, ne se défaisait pas de sa bonne humeur – elle en était presque contagieuse. Ce jeune homme représentait ce que j’aurais souhaité être également pour autrui ; hélas, je savais uniquement guérir les corps, c’était un fait dont j’avais toujours eu conscience.

À sa surprenante réponse, d’une simplicité enfantine, mes larmes cessèrent d’affluer à mes yeux. Il m’offrait du répit. Un souffle amusé s’échappa même de mes lèvres qui se courbait délicatement, étant cette fois perméable à son humour. Ainsi, pendant qu’il poursuivait son monologue - ponctué de quelques questions, je trouvais en lui la sérénité dont j’avais besoin. Mon cœur affolé calmait ses palpitations douloureuses.

Précédemment, les mots d’Isaac provoquaient en moi une honte indicible malgré la gentillesse avec laquelle il les employait. C’était dommage. Cette fois-ci, ses paroles me touchaient, au point d’en sécher mes larmes et de me redonner le sourire. Qu’il souhaite malgré tout apprendre à me connaître m’emplissait d’une joie sans nom, retranscrit par mes lèvres étirées plus que de coutume.
Il se présentait tel un ami, à me tendre ainsi la main, et je ne désirai rien de plus qu’à cet instant que de la saisir, et de le remercier de cet intérêt qu’il me portait. Le faire avec des mots était toutefois maladroit, et serait loin de suffire. Pour l’instant, je me contenterai de poursuivre nos séances, de lui porter secours autant de fois que nécessaire et plus encore... Puis je trouverai comment lui faire part de ma reconnaissance.

« J’aime les fleurs, » répondis-je finalement, après avoir laissé un silence suffisamment long pour que l’idée de le rompre devienne primordial. Du bout du doigt, j’essuyai une larme tenace du coin de mon œil, et soupirai tranquillement. Le torrent d’émotion se calmait enfin, rendant ma respiration plus douce et contrôlée. « Tout comme vous êtes certain de votre goût prononcé pour la vanille – mon petit plaisir, ce sont les fleurs, je crois. »

Je levai les yeux, me dérobant à son regard au risque de m’empourprer d’embarras. Le ciel s’était assombri, pourtant tout me paraissait plus clair et appréciable. Il était agaçant d’être si facilement en proie à un tourbillon de sentiments – il s’effaçait aussi vite et simplement qu’il venait, imprévisible et indomptable. J’abaissai mes paupières pour apprécier la brise, les mains jointes contre mes genoux – plus que le vent, c’était ce nouveau silence dans mon cœur dont je me délectai.

« J’ai effectivement quelques personnes sur lesquelles compter – je n’ai toutefois jamais eu l’occasion d’aborder un tel sujet auparavant. Vous êtes mon premier... » Hésitai-je soudain.  

Je baissai les yeux pour le considérer sous une nouvelle lumière, comme si son regard franc et pénétrant pouvait me chuchoter la réponse. Et je la trouvais, entre les éclats de cristaux dont son regard semblait être composé.

« … confident ? » terminai-je alors ma phrase, sans être parfaitement sûre de moi. Je ne voulais pas lui imposer un tel rôle ; c’était un simple constat de ma part. Il était le premier à qui j’avais confié un problème auquel je faisais face, le premier à qui j’avais admis en avoir, pour commencer.

J’inclinai légèrement la tête sur le côté, me faisant violence pour soutenir son regard, bien que je sentis immédiatement mon sang affluer à mes oreilles. J’espérais que mes longs cheveux suffiraient à les cacher. Cette conversation devenait de plus en plus personnelle, et sincère, chose à laquelle je n’étais pas habituée. Je ne pense pas que je m’y habituerai un jour.

« Alors... Je ne pense pas que vous ayez à me demander. Ça me ferait très plaisir. »

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Isaac G. Yuri
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Auprès de mon arbre | Medea ♦
Mar 27 Avr - 9:55
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Anémone.



Medea appréciait les fleurs. Jamais un stéréotype n’avait été plus appréciable aux yeux d’Isaac.

Il hésita à lui demander quelles étaient ses préférences en termes de fleurs, si elle était de ces gens qui voyaient dans la forme des pétales et dans le nombre d’un bouquet les messages cachés qui trahissaient les intentions du cœur. Peut-être n’aimait-elle pas les recevoir, ou peut-être appréciait-elle l’idée d’un romantisme si ancien et immuable qu’il en était devenu appréciable.

S’amuserait-elle à confectionner ses propres créations, s’embêterait-elle à entretenir la vie qui germait dans un petit pot, s’embarrasserait-elle qu’on lui en offre ?

L’étudiant n’était pas un grand adorateur de fleurs, à dire vrai il lui était même difficile d’en renifler l’arôme sans être pris d’éternuements. Il les appréciait plutôt de loin, comme il appréciait un lever de soleil. Prendre de la distance pour mieux observer.

A l’image de ces petites graines qui à force d’être arrosées finissaient par bourgeonner, l’idée d’offrir à l’infirmière un bouquet anonyme germait dans l’esprit d’Isaac. Le concerné ricana de sa vulnérabilité, contraint d’admettre qu’il était assez peu capable de se priver d’une occasion de faire sourire la jeune fille.

Il finit alors par acquiescer, prêtant serment envers lui-même. Cette idée ne tomberait pas dans le puit sans fond, dans cet abîme insondable où gisaient dans la paix éternelle de la paresse ses bonnes résolutions et ses projets d’avenir.

« Votre premier confident ? Quel honneur, je ne sais pas si j’en suis digne. » Il finit par exprimer, de cette même complicité amicale. « Je ferai de mon mieux, toutefois. » s’empressa-t-il d’ajouter, de peur que ses premiers mots n’invitent l’infirmière à lui retirer son badge. Trop tard !

Le temps de souffler un rire, l’étudiant détacha son regard de la silhouette de sa voisine, fermant les paupières tandis qu’il laissait l’air s’infiltrer dans ses poumons. Le blanc hiémal de quelques mèches retomba comme de la poudreuse sur son visage apaisé.

Il se sentait à l’aise. Si bien. Il y avait alors peu de choses qu’il n’aurait pas sacrifié pour mettre la main sur le sablier du temps et cesser son écoulement le temps de quelques heures. Voire quelques jours.

« Me voilà donc affublé d’une nouvelle mission. Celle de vous aider à mieux vous connaître. Et par la même en profiter un peu, j’admets. » En bon soldat, Isaac prenait ses missions très à cœur.  

« Avez-vous une idée d’où nous pourrions commencer ? Peut-être pourriez-vous me parler de vos passe-temps, de ce qui vous occupe lorsque vous n’êtes pas déjà en train de sauver le monde. » Point d’ironie dans sa phrase, le bougre la voyait véritablement comme un genre d’ange gardien à l’auréole immarcescible.

Plus amusant toutefois, Isaac se mit en tête de deviner. « Je ne vous imagine pas vraiment du genre sportif… La lecture, peut-être ? Ou quelque chose d’artistique. Certainement quelque chose d’artistique. » Les yeux plissés, il avait recommencé à lorgner sur la silhouette de Medea. En proie à d’intenses réflexions, il se retrouva coi face à son incompétence.

« Je ne pense pas que vous soyez du genre à traîner dans les bars ou à faire la fête, sinon nous nous y serions déjà croisés. » Confessa-t-il d’un rire empli de dérision. Voilà une autre résolution qui avait fini dans le puit il y a longtemps ; arrêter l’alcool.

« J’ai raison d’assumer que vous préférez donc le calme à l’agitation ? » Le cadre aidait beaucoup cette suggestion. Après tout, les deux s’étaient fait les prisonniers d’une nature morte bercée par une paix absolue. C’était un moment que tous ne sauraient apprécier, un endroit dont beaucoup chercheraient à fuir. « Aaah, la couture, peut-être ! Je m’éloigne, non ? » Assez immature, voilà qu’il se perdait dans ses tentatives, une grimace d’embarras gagnant de plus en plus de terrain sur son visage.

Était-ce seulement acceptable pour un psychologue d’être si mauvais pour décrypter son prochain ? Pour couper court au malaise, il laissa son silence supplier à l'infirmière d'apporter la réponse.






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Medea I. Kierkegaard
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Auprès de mon arbre | Medea ♦
Sam 1 Mai - 17:35

Le but de cette confidence n’avait pas été de lui imposer un quelconque rôle - ou mission, comme il l’appelait. Je ne le reprenais pas sur le sujet pour la simple raison qu’il ne semblait pas gêné par ce nouveau statut – c'était un soulagement pour moi, me faisant apprécier un peu plus l’instant, ainsi que sa personne. Je me questionnai alors sur ce qui le poussait à me venir en aide, à se montrer si ouvert d’esprit et à me tendre la main, comme si son cœur reposait au creux de sa paume.
Je réalisai soudainement qu’il m’était aussi inconnu que je l’étais pour lui. Nous avions partagé quelques moments ensemble, il était vrai, et son amour pour la vanille n’était plus un secret, mais ça ne suffisait pas à ce que je puisse clamer le connaître. Il se présentait tel un ami ; mais pouvait-il véritablement l’être, lorsque nous en savions encore si peu, l’un sur l’autre ?

Ça n’était toutefois pas le moment de l’importuner sur le sujet. Chaque chose en son temps. Pour l’heure, Isaac poursuivait ses interrogations sans discontinuité et m’assommait presque avec ces dernières tant il en avait sous le coude.
Au lieu de me sentir dépassée, j’en étais spécialement amusée. Plus les mots s’écoulaient de sa bouche, plus mes lèvres se courbaient, jusqu’à ce que mes joues me fassent souffrir et que je ne réussisse plus à contenir mon hilarité. L’expression de l’étudiant emplie de gêne fut la clé pour me soutirer un rire – contrairement aux éclats dont lui-même était capable, le mien était d’une telle légèreté qu’on pourrait le rater, le son couvert par le bruit du vent.

Une main posée contre ma bouche, je me sentais un peu idiote, sans ressentir l’embarras qui accompagnait généralement ce sentiment. J’agitai ma main libre dans un geste vague, l’air de dire qu’il ne fallait pas prêter attention à mes sautes d’humeur. Si je continuais sur cette voie, à passer des larmes au rire, il me prendrait bientôt pour une folle.
Toussotant légèrement afin de reprendre contenance, je glissai une main dans mes cheveux, comme si mettre de l’ordre dans mes mèches me servait à calmer mes nerfs par la même occasion. Mes lèvres restaient tout de même étirées en un large sourire.

« Je m’excuse si j’ai eu l’air de me moquer, c’était loin d’être mon intention. Vous étiez juste si... concentré à essayer de deviner que... Ah, je m’enfonce. » Je m’arrêtai précipitamment, replaçant une main devant ma bouche, la tapant doucement des doigts comme pour punir les mots qui en sortaient. J’étais sur le point de lui admettre qu’il avait été adorable, ce qu’il n’aurait sûrement pas bien pris.

Je secouai la tête avant de repasser au sujet principal.

« Vous avez raison sur plusieurs points, » commençai-je, les mains à nouveau jointes sagement sur mes genoux. « Je préfère le calme à l’agitation, les endroits peu peuplés à ceux bondés de monde. »

Songeant à tout ce que je faisais pour m’occuper en dehors du travail, je levai le menton pour contempler la nuit tombante. Il m’était plus simple de me concentrer face à cette image qu’en admirant le visage de mon interlocuteur.

« Il m’arrive de lire à quelques occasions, oui... Ou bien de m’entrainer sur de nouvelles recettes, pour varier mon alimentation, et apprendre à ne plus brûler ma cuisine. Hum... » Fronçai-je les sourcils en réfléchissant. « Il me semble que je passe essentiellement du temps à me reposer, entre les contrecoups de mon pouvoir et toute l’énergie que je dépense au travail... Je ne regarde pas la télévision et... Oh, je ne crois pas avoir déjà été au cinéma. »

La raison était plutôt simple lorsque j’y pensais : je n’avais personne pour m’accompagner. Shiori, l’une de mes amies, m’amenait à des endroits bien différents pour me détendre et que l’on puisse discuter.
Ne trouvant rien d’autre à préciser pour l’instant, je baissai la tête pour regarder à nouveau Isaac, et lui adressai un petit sourire timide.

« J’en parle assez peu mais... Vous savez, j’aimerais également apprendre à vous connaître plus amplement, Isaac. » Avouai-je alors, jugeant le moment plus opportun pour en parler.

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Isaac G. Yuri
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Lun 3 Mai - 10:11
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Woah.



Isaac partagea volontiers le rire de Medea. Heureusement pour lui – ou pour elle, l’étudiant n’était pas du genre rancunier. En même temps, il aurait été illogique pour un agent du chaos et de la taquinerie de ne pas savoir recevoir quelques moqueries de temps en temps.

Qui vit par le feu périra par le lance-flamme. Les plaisanteries n’avaient de sens que si elles pouvaient être retournées et appréciées à leurs justes valeurs. De facto, il était même plutôt rassuré de voir que son interlocutrice ne se privait pas. Et puis, c’était l’occasion d’entendre son rire, dans toute sa franchise et splendeur.

Ça valait le coup.

Comme pour jouer la comédie et paraître outré, le jeune homme remonta néanmoins ses lunettes le long de son nez de sorte à ce qu’elles cachent une bonne partie de son visage, une autre main divaguant dans le vide, faisant des gestes dédaigneux. « Je vois. Ça se moque. »

« Sympa. »

Il dut toutefois bien vite faire une croix sur sa palme d’or, car un second esclaffement fit gonfler ses joues et manqua de l’asphyxier. Toute la volonté du monde n’avait pas suffi à maintenir son air bougon et son silence plus d’une dizaine de secondes. Avec un peu de chance, c’était juste assez pour que l’on comprenne bien l’ampleur de son absurdité.

« Oh vous ne vous enfoncez pas. Je vous en prie continuez donc de vous moquer. » En – presque, bon psychologue, il savait reconnaître une échappatoire quand il en voyait une. Au même titre qu’il percevait quand un élève lui mentait, il comprit bien vite que plus que de ne pas vouloir ‘ s’enfoncer ‘, ce n’était pas la culpabilité qui retenait sa langue.

Profitant de ses derniers ricanements légers, le bout de l’index pinçant l’extrémité de son nez, Isaac profita ensuite de la réponse à ses devinettes. Il n’était pas si loin du but, ce qui était rassurant.

« Honnêtement, j’ai pas pris beaucoup de risque en misant sur le calme et l’isolement. »  Dit-il à la volée, sans attendre de réponses. La paume de sa main détailla vaguement les environs. Ce petit parc tranquille que l’obscurité rendait infini, cet arbre splendide digne des meilleurs romans, cette toile stellaire qui offrait lumière et ambiance. Même la profession de Medea en disait long. Après une journée passée dans l’effervescence du monde médical, nul doute qu’une pause doucereuse et paisible était appréciable.

Cessant de commenter tout ce qui se passait, il se laissa être un auditeur paisible et discipliné, écoutant avec déférence les mots de l’infirmière. Il était celui à l’origine de toutes ces réponses, c’était bien la moindre des choses de les écouter dignement.

Son sourire grandissant trahissait son amour de l’instant. A mesure que les mots s’échappaient des lèvres rosées de la jeune fille, lui gagnait en assurance et en confort. Il se découvrit quelques points communs appréciables ainsi que des opportunités trop gentiment tendues pour être laissées de côté.

« Faire ma connaissance ? » Se surprit-il. Quelle drôle d’idée.

« Ma foi, je n’ai pas d’objections. Que voulez-vous savoir ?  Je pense pas avoir beaucoup de choses bien intéressantes à raconter pour être honnête, mais je veux bien tout vous dire. » Il s’amusa de la question, cherchant une fois de plus à deviner le sujet du futur interrogatoire auquel il s’exposait volontiers.

« Je pense être encore plus mauvais que vous en cuisine, et je ne connais que les premières pages des livres de ma bibliothèque. » Était-ce parce qu’il s’endormait systématiquement après la quatrième ligne ou bien parce qu’il souffrait d’un trouble de l’attention ? Il n’osera pas lever le voile sur ce mystère, le laissant reposer au creux de la nuit.

« Le reste du temps, j’imagine que je fais comme vous ; je me repose. Notamment grâce à vous. Non pas que j’en ai particulièrement besoin, mais j’ai développé un talent particulier lorsqu’il devient question de perdre son temps. » Ses deux principales activités étant dormir et faire la sieste, Isaac était effectivement un virtuose, le héros qu'on ne méritait pas. « Cependant, il me semble que vous ratez plein de choses, Medea. Reprendre des forces est une chose, mais de là à rater un film en 3D et une crise de foie à cause du popcorn… Disons qu’il y a des priorités. »

Retirant ses lunettes, il coinça une des branches entre deux incisives, s’amusant à les faire monter puis descendre au rythme erratique de sa mâchoire.

« Au pire, vous n’avez qu’à me montrer comment vous faîtes pour progresser en cuisine, et je me charge de vous faire découvrir quelques trucs intéressants. Comme le cinéma, par exemple. » Décidément, l’infirmière avait le chic lorsqu’il était question d’éveiller la bonhomie de l’étudiant. Voilà une autre proposition qu’il soumettait, son sourire radieux ne décrivant que de la sympathie.  






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Medea I. Kierkegaard
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Lun 10 Mai - 16:49


L’atmosphère s’était adoucie comparée au début de soirée - la négativité m’avait quitté, ne laissant derrière que des esquisses jolies, peintes sur mon visage de marbre. Isaac tenait le pinceau, sans être conscient du pouvoir qu’il avait entre les doigts, capable de faire naître moultes émotions au creux de mon cœur. Pendant un temps, il l’agitait de façon à ce que la courbe de mes lèvres ne connaisse pas de fin. Son insistance sur ma possible moquerie à son égard ne fit qu’intensifier l’effet - je peinais alors à garder mon calme.
Une drôle d’image s’imposa à mon esprit ; la statue de marbre fondait face à la chaleur bienveillante de l’homme aux couleurs étrangement glacées. Comment réagirait-il, si je lui faisais part de cette pensée ?

Mon impression d’Isaac se renforçait à mesure qu’il parle, gesticule et rit. Soudain, du regret s’invita en moi – le regret de ne pas m’être penchée plus tôt sur le cas de l’étudiant, de n’avoir pas cherché plus tôt à découvrir qui il était au-delà d’un patient, de ne pas l’avoir traité comme une personne immédiatement. Ce sentiment ne prit toutefois pas racine et ne ternit pas le sourire qui occupait encore mes lippes. Il n’était pas trop tard pour rectifier cette erreur, il me suffisait de concentrer dorénavant mon attention sur lui – sur ce petit soleil ambulant, songeai-je avec amusement et affection.

J’aimerai tout savoir, me retins-je de dire, les lèvres pincées. Loin d’être dupe, je savais pertinemment qu’il y avait une autre facette à découvrir derrière cette jovialité apparente – comment ne pas le savoir, lorsque la raison première de ma présence était due à ses insomnies récurrentes. Si j’étais au courant de ce fait, je n’avais toutefois aucune idée de ce qui les provoquait. Pour l’heure, il n’était pas question d’un sujet si lourd et épineux, alors je tus ma curiosité grandissante.

« Votre passe-temps consiste donc à dormir... Un choix intéressant, » m’amusai-je, en secouant légèrement la tête devant cette idée un peu saugrenue. Celle qui me vint ensuite en tête ne l’était que davantage, mais je décidai de ne pas la garder pour moi, simplement pour démontrer qu’il m’était également possible de plaisanter. « C’est une proposition tout à fait alléchante, si l’on omet le popcorn que je ne peux que déconseiller... Très bien, c’est un rendez-vous alors. » Mais comprendrait-il la blague, ou prendrait-il ces mots au premier degré ?

Je cachai un possible embarras en détournant à nouveau le visage, utilisant cette pause pour prétendre être occupée à ranger mon livre – je ne le lirai jamais, de toute évidence.
Je soufflai doucement en réalisant que ma fatigue m’était plus supportable qu’auparavant, cependant je ferai mieux de la garder en tête pour m’éviter un quelconque pépin futur. Le mieux à faire était de ne plus lancer de discussion au potentiel désastreux, pour me garder d’un autre changement brusque d’humeur.

Dans cette optique, je relançai la conversation sur un autre point qui m’avait interpelé :

« Je trouve ça dommage que nous n’ayons jamais pris le temps de réellement discuter ensemble avant ce jour. » Une légère moue s’installa sur mon visage. « Nos seules rencontres, jusqu’ici, ont été pour vous aider à dormir – ce que je ne compte pas arrêter, ne vous en faîtes pas, mais je songeai que nous pourrions également nous voir uniquement dans le but de converser, autour d’un café par exemple...  Qu’en dîtes-vous ? »

Un doigt posé contre ma joue, j’inclinai la tête en l’observant sous mes longs cils. Cette soirée m’avait beaucoup appris, je n’avais pas pour intention de laisser filer l’occasion de m’améliorer sur les points présentés précédemment ainsi que la possibilité d’assouvir ma curiosité le concernant. D’une pierre deux coups, comme on dit.

« Je pense que ça nous aiderait davantage à faire connaissance, qu’à travers de simples faits énoncés. » Un fin sourire étira mes lèvres alors qu’un élan d’audace me poussa à poursuivre. « Je suis très intriguée de voir à quel point vous pouvez être adorable. »

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Auprès de mon arbre
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Isaac G. Yuri
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Isaac G. Yuri



Auprès de mon arbre | Medea ♦
Lun 10 Mai - 17:43
auprès de mon arbre
Ft. Medea I. Kierkegaard

Outch.



A voir Medea reprendre de ses couleurs et paraître de plus en plus expressive, une pointe d’émotion fit s’étendre un peu plus le sourire d’Isaac. Il appréciait ces instants où les voiles étaient levés, où les regards et les rires prenaient la place des mots. En un sens, c’était presque s’il se félicitait de l’effet positif qu’il semblait avoir sur l’infirmière.

Si l’ange gardien était du genre à soigner les corps, peut-être qu’Isaac était capable de soigner l’esprit.

Il acquiesça ainsi paisiblement, convaincu par ses propres réflexions. A deux doigts de dire qu’ils formaient un beau duo, il haussa une épaule pour ne pas briser le silence, pour ne pas donner une excuse à la jeune femme de faire taire sa voix. Qu’elle continue jusqu’à l’extinction s’il le fallait, tant que la fin ne cessait d’être repoussée.

Le talent de Medea lorsqu’il était question d’hypnotiser les gens lui était taillé sur mesure. La simple écoute de sa voix suffisait à apaiser Isaac, qui se voyait sur un radeau perdu entre le bleu du ciel et celui de l’océan, porté au gré de vagues relaxantes dont l’écume venait couvrir sa silhouette d’un manteau réconfortant. Dans cet imaginaire où tout était en suspens, il se plaisait à se perdre et à se laisser guider, à faire confiance à une main accompagnatrice qui ne le mènerait que vers des étendues plus sages encore. Sa mélodie se faisant tantôt celle d’une sirène dont il s’empressait de dévorer le chant, tantôt celle d’un appel lointain qui résonnait entre les nuages, il appréciait lorsque sa réalité se retrouvait sous son emprise.

Toujours allongé, il manqua d’avaler ses lunettes lorsque son interlocutrice évoqua un potentiel rendez-vous, ce qui l’expulsa de son imaginaire avec la puissance d’un cyclone. Si la proposition était louable, la formulation avait quelque chose d’assez original pour arracher un hoquet de stupeur à l’étudiant. S’efforçant de dissimuler la douleur qui lui avait fait bondir la glotte, il retira paisiblement ses lunettes pour le déposer sur le côté, loin de tout danger potentiel.

Se persuadant que sa bêtise n’avait pas été vue, il fit de son mieux pour rester digne et impassible, parlant d’une voix aussi maîtrisée que possible.

« Que serait la vie sans un peu de risques. Au pire vous n’aurez qu’à prendre un petit sachet ! S’il vous arrive malheur, je connais l’adresse d’une bonne infirmière sinon. » Le fond de sa gorge continuant de s’érafler à chaque mot, il toussa dans sa poigne avant de reprendre d’une voix plus éclaircie. « Je crois que vous ne pourrez pas trouver d’excuses que je ne pourrai pas contrecarrer, il va falloir vous faire une raison et mettre votre foie en péril. »

En bon petit diable sur l’épaule, c’était là une mission qu’Isaac n’était pas près d’abandonner. Le bougre répondait toujours présent lorsqu’il était question d’avoir des mauvaises idées, peut-être même plus encore lorsqu’il fallait traîner autrui dans ses machinations perchées.

« Je fréquente beaucoup de cafés, ce serait un plaisir de vous en faire découvrir quelques-uns. A moins que vous n’ayez déjà de bonnes adresses. » Par élégance, il avait remplacé le mot ‘bar’ par le mot ‘café’, dissimulant son amour un peu trop prononcé pour les liqueurs derrière la chaleur d’une conversation tranquille échangée autour d’un café.

Il se retint d’ajouter qu’ils n’avaient qu’à tous les faire, que chaque bâtisse se verrait attribuée sa conversation, que les instants se multiplieraient sans halte. D’un air plus sobre, il compléta toutefois.

« Les meilleurs cadres seront toutefois en extérieur. Boire un café est une chose, mais profiter d’une jolie vue l’est encore plus. » Un index s’était levé par habitude, le regard orienté vers l’infirmière depuis trop longtemps pour qu’il s’en souvienne. « Par chez moi, on pense que la qualité de la conversation dépend également de la qualité du cadre. J’ai hâte de voir ce que cela nous réserve. »

Il s’amusait effectivement à anticiper ce que l’infirmière pouvait encore offrir. Si leur échange actuel à l’ombre d’un arbre isolé était aussi agréable, qu’en serait-il dans un endroit véritablement magnifique ? Plutôt confiant, Isaac haussa d’une épaule, conscient que peu importe l’endroit il serait forcément embelli par sa simple présence.

Un poil d’embarras s’invita alors sur son visage, manquant d’empourprer ses joues. Il écoutait Medea si paisiblement qu’il manqua de faire attention à un compliment sauvage auquel il ne s’attendait pas. Sans vraiment savoir comment réagir, il soupira un rire nerveux.

« Je ne suis pas certain qu’il y ait grand-chose de plus à découvrir, mais je vous en prie, continuez à être intriguée. Ça me permettra d’avoir toujours une excuse pour solliciter votre attention. »

Les tenanciers allaient faire fortune.





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Medea I. Kierkegaard
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Medea I. Kierkegaard



Auprès de mon arbre | Medea ♦
Jeu 20 Mai - 17:40


D’une humeur bien différente que précédemment, je ne ratai pas la perche qu’il me tendait et fronçai délicatement les sourcils dans une nouvelle moue faussement offensée qui gonfla comiquement mes joues durant une seconde :

« Je vois... Vous me trompez donc avec une autre infirmière ? Est-ce là votre confession ? » Lui répondis-je avant de détourner le visage dans un mouvement surjoué, les paupières closes, un léger souffle s’échappant de mes narines pour marquer mes gamineries.

Aussi rare que cela puisse être, il m’arrivait bel et bien d’agir en parfaite enfant, si je me trouvais en compagnie suffisamment agréable et confortable. C’était le cas, avec Isaac. Il était doux comme il était enfantin. Les deux se mêlaient très bien en lui sans que ça ne me paraisse exagéré, ou pénible. De mon point de vue, c’était un parfait dosage qui le rendait plaisant, avec une pointe d’enchantement pour parvenir à me sortir de ma coquille.

« Pour la peine, je refuse catégoriquement de goûter au moindre popcorn, » renchéris-je avant que ma façade bougonneuse ne s’efface subitement pour laisser place à un nouvel éclat de rire de ma part.

Je me sentais un peu idiote, sans ressentir l’habituel embarras qu’un tel sentiment invite à ses côtés. Mon cœur se sentait libéré de toutes pensées noires. La légèreté dont mon corps était actuellement emprunt... Oh, était-ce dû à l’alcool ? Mon regard fut aussitôt attiré par mon verre, à moitié plein, posé non-loin de moi. Il serait certainement plus sage de ne pas me resservir... après celui-ci.

Me calmant de cette nouvelle hilarité, je prêtai attention à ses mots en récupérant doucement mon souffle. Sous mes doigts, je sentais l’affolement d’un cœur nullement habitué à tant d’émotion, qui peinait alors à se remettre d’un tout et d’un rien. La jovialité tranquille d’Isaac réussissait toutefois à avoir raison de moi, m’enfermant dans un cocon de quiétude et de sûreté.
À travers ses mots, je réalisai les circonstances de notre début d’amitié. Nous serions-nous intéressés, l’un à l’autre, si mon pouvoir n’avait pas existé pour jouer l’élément déclencheur ? Cette pensée me rendit étrangement triste. Je ne souhaitai pas revenir en arrière, et ne plus avoir l’étudiant dans ma vie. Il s’y était trouvé une petite place que je ne comptais pas lui arracher.

Alors que je m’apprêtai à lui répondre, une bourrasque nous frappa de plein fouet. Mon seul instinct fut de tenir mon verre, pour empêcher son contenu de se déverser sur le drap sur lequel nous étions assis. Une fois le vent apaisé, je soupirai doucement de soulagement en voyant que rien n’avait été bouleversé par celui-ci.
Puis, un sourire mi-amusé mi-attendri se glissa sur mes lèvres, sans que je ne m’en rende compte, lorsque je posai les yeux sur le jeune homme. Quelques feuilles lui étaient tombées dessus. Je ne doutai pas de sa capacité à les remarquer et les enlever prestement... Cependant, ça ne m’empêcha pas de lui venir en aide. Je me penchai vers lui, une main posée tout près de lui pour me maintenir, et de ma main libre je retirai quelques feuilles coincées entre ses mèches étonnamment blanches, et poursuivis dans le même temps la conversation :

« Avez-vous déjà des endroits en tête, qui valent le coup d’œil ? Ayant passé le plus clair de mon temps le nez plongé dans un bouquin, je n’ai pas connaissance des lieux intéressants à visiter. »

Je soufflai sur une dernière feuille qui s’envola de ma paume, et ignorai la proximité d’Isaac, à peine quelques centimètres en-dessous de moi. Plutôt que d’en être gênée, je lui adressai un doux sourire alors que je me permettais de déplacer quelques mèches neigeuses sur son front jusqu’à ce que j’en sois satisfaite.

« Ne vous sous-estimez pas, vous aurez toujours mon attention, Isaac. Vous avez réussi là où beaucoup ont abandonné. Ma curiosité est piquée, vous ne pouvez plus vous échapper à présent. »

Cette dernière partie n’était qu’une plaisanterie, alors je l’accompagnai d’un sourire un peu plus malicieux. Ces paroles dites, je pouvais me redresser.

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Isaac G. Yuri
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Isaac G. Yuri



Auprès de mon arbre | Medea ♦
Mar 25 Mai - 8:12
auprès de mon arbre
Ft. kya

Oh-oh..



Isaac avait l’impression d’être retombé en enfance, se surprenant à témoigner la même immaturité que jadis. La conversation s’était parée de différents atours et ambiances, et ce avant même qu’il n’eut le temps de le remarquer. Loin de l’en déplaire, il accueillit la nouvelle avec un rire enfantin, répondant à Medea d’un geste de main vague qui fouettait l’air avec un faux mépris.

« Navré, navré, mais vous ne me suffisiez plus. Ce n’est pas vous le problème, c’est moi. Vous méritez mieux. » Déclara-t-il avant de ricaner de plus belle, d’un rire qui se voulait toutefois jaune. Sûrement n’était-ce pas la première fois qu’il entendait ces mots. D’un souffle, il marqua une pause dans ses plaisanteries, dissipant aussi les quelques souvenirs amers qui lui remontaient le long de l’estomac.

« Enfin, puisque vous le prenez ainsi, je pense l’inviter à votre place. Sans doute que cette infirmière là saura apprécier la saveur du popcorn à sa juste valeur. Hmpf. » L’entracte fut de courte durée, car déjà voilà qu’il imitait de nouveau la gestuelle de Medea pour la tourner en ridicule. L’étudiant étant allongé, l’entreprise était périlleuse et probablement plus risible que ce qu’il n’espérait.

Le calme revint alors, comme une petite parenthèse entre deux éclats de rire. Isaac en avait perdu la notion du temps, actuellement incapable de réaliser depuis combien de temps les deux étaient occupés à parler de tout, mais surtout de rien. Loin de s’en plaindre, il laissa son éternel sourire marquer son visage, les joues légèrement empourprées de la bienfaisante douleur d’un sourire trop longtemps maintenu.

Le temps semblait effectivement accorder un peu de miséricorde au pauvre russe. Lui qui d’habitude se sentait tant tourmenté par le sablier se voyait là exempté de ses inquiétudes. Il n’y avait qu’un instant à savourer, comme un genre de plaisir coupable qu’on s’empresserait de dévorer avant que la rétribution ne vienne.

Il avait l’impression que ces quelques heures l’avaient autant approché de Medea que des mois d’amitié, ce qui n’était qu’une énième cerise disposée sur ce gâteau déjà ô combien attrayant.

Alors qu’il s’apprêta à boire une gorgée d’un vin trop longtemps délaissé, il ouvrit les yeux sur une feuille morte étant tombée au creux de son verre. Une bourrasque achevant de confesser ses crimes, il glissa le verre sur le côté avant qu’une demie dizaine de feuilles ne le prennent d’assaut. Pour éluder le ridicule, Isaac souffla de la bouche, espérant parvenir à se débarrasser de ces assaillants avant que l’infirmière ne le remarque.

C’était cependant peine perdue, car déjà s’était-elle amenée et était en train de porter secours à l’étudiant.

Ce dernier l’observa en contrebas, de ses yeux grands ouverts qui prirent tout le temps du monde à se détacher de la bienveillante silhouette qui flottait au-dessus de lui. Un sourire un poil nerveux se dessina sur ses lèvres, tandis qu’il souffla une insulte à l’attention de l’arbre, qui aurait dû être pourvu de quelques centaines de feuilles supplémentaires.

Juste comme ça.

« Je retire ce que j’ai dis quant au fait que je n’étais pas une demoiselle en détresse empotée. » L’humour comme d’une pommade, il usa d’un ricanement pour détourner l’attention de son cœur battant ou du silence qu’il était sur le point de prolonger malgré lui.

Surtout après les derniers mots que Medea eut finit de prononcer.

Ravalant sa salive pour se donner un peu de contenance, il maintint sa position et acquiesça d’un geste rapide. Il saisit la conversation à la volée comme on saisirait un train à la destination inconnue.

« J’aime beaucoup les balades nocturnes, où les lueurs de la ville se confondent avec celles du ciel. Il y a un lac non loin de là où l’on voit les étoiles se refléter sur l’eau calme. Sinon il y a un bar assez typique où la clientèle se fait rare passé une certaine heure, c’est l’endroit parfait pour boire sans trop être dérangé… Mmh, autrement, il y a le casino, des fois que vous aimeriez mettre vos talents – et surtout votre chance, à l’épreuve. Vous avez une préférence ? » Il avait beau être du genre bavard, son débit de parole trahissait une certaine nervosité.

« Enfin, moi m’échapper ? » Le professeur souffla un gloussement, juste assez fort pour qu’il fasse chanceler une mèche ébène de l’infirmière. Donnant-donnant. « J’ai l’air de le vouloir, selon vous ? D’ailleurs, qu’ai-je réussi à accomplir de si spécial ? » Faisant mine d’être en contrôle, il croisa les bras derrière sa nuque pour pouvoir observer plus confortablement.

Heureusement que le pouvoir de Medea ne lui permettait ni de s’immiscer dans les pensées, ni d’entendre le rythme cardiaque… D’ailleurs à ce propos, était-il en train de se faire hypnotiser ?





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