Certains élèves étaient particulièrement difficiles, mais la jeune femme y arrivait, en règle général. Après tout, les plus compliqués faisaient parti de la fameuse classe E, classe dont elle venait à la base. Elle appréciait les pseudo-racailles qui en faisaient parti, les comprenant d'une certaine manière. Elle-même avait été une jeune adulte difficile, elle avait sûrement fait regretté à certains professeurs d'avoir ce métier. Avec son pouvoir, combien de fois avait-elle quitté les cours d'un claquement de mains, marmonnant quelques insultes à peine audibles ? Combien de fois avait-elle initié des affrontements avec les classes au-dessus ? Combien de fois avait-elle surgi brusquement de nul part pour tabasser à harceleur ? Shiori devait se rendre à l'évidence : elle avait été une sale gosse elle aussi.
Alors elle aimait bien cette classe E, elle comprenait leur amertume d'être considéré comme des imbéciles, d'être rabaissés à longueur de journée, d'être pointé du doigt et vu comme des parias. Seulement, elle devait avouer qu'une part d'entre eux lui donnait du fil à retordre. En particulier Hadès Dawson, un jeune homme aussi tatoué qu'il avait un caractère difficile. Il semblait jouer avec la limite de se faire virer de cours, usant de réponses cinglantes, de propos acérés qui faisaient soupirer la Japonaise. Quant aux jeux en équipes qu'elle organisait ou aux travaux de groupe, s'il y prenait part, c'était toujours armé d'une mauvaise volonté effarante.
La jeune femme n'était pas du genre à laisser tomber et si elle n'avait pas encore pu prendre le temps de discuter avec lui en face-à-face, il était temps. Mener le cours lorsqu'il était là était désagréable, et même si Shiori se montrait parfois taquine pour tâcher de détendre l'atmosphère, ce n'était pas gagné. Partisane de discuter pour ne pas punir inutilement, Shiori attendait donc que les élèves remballent leurs affaires. Ses prunelles émeraude scrutaient les jeunes tranquillement, son petit sourire mutin habituel aux lèvres. Elle les saluait, s'amusant de certains qui quittaient la salle en dansant, en lançant une blague ou en jouant les gros bras. Lorsque Hadès approcha, elle tendit une main afin de capter son attention.
Fit-elle en ignorant les quelques regards curieux des derniers quittant la salle. L'un d'eux ferma la porte derrière lui, laissant le colosse tatoué face à la professeur qui l'était tout autant. La robe sombre aux demi-manches qu'elle portait aujourd'hui les dévoilait volontiers. Son visage avait les traits détendus, tranquille, désireuse de montrer au jeune homme qu'elle n'était pas là pour quelconque reproche.
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