La jeune brune parcourait les herbiers avec acharnement depuis maintenant plus d’une heure sans trouver la moindre chose intéressante et pertinente pour ses recherches. D’habitude, elle cherchait dans les ouvrages qu’ils gardaient à la serre mais elle les avait déjà tant parcourus qu’elle les connaissait par cœur. Elle soupira et se laissa aller contre une étagère après avoir ranger le dernier livre infructueux. De l’autre côté, des voix s’élevèrent et elle tendit l’oreille ; la bibliothèque dans les coins reculés, cela ne pouvait être que des commérages ou des rumeurs croustillantes et elle A-DO-RAIT ça.

- Si, il parait qu'elle ne se lave pas, en même temps, regarde-là, ça t'étonne vraiment toi ? Pas moyen que je m'approche d'elle ...
- Salut les filles ! Lança-t-elle en apparaissant dans leurs champs de vision. Vous parlez de qui ?

Les deux amies la regardent avec des airs ahuris avant de jeter un regard à une blonde assise non loin, près d’une fenêtre. Forcément, une brune tout sourire qui s'immisce dans la conversation de commère, ça surprend. Mais Maëllys s'en moque, elle entend une rumeur, elle veut en connaitre la véracité, c'est comme ça qu'elle fonctionne depuis toujours. Elle reste souriante avec ses grands yeux verts et leur fait signe de continuer mais tout ce qu’elle obtient en retour, ce sont des regards courroucés avant qu’elles ne s’en aillent en chuchotant. La brune les regarde partir en haussant les épaules, puisqu’elles ne veulent pas lui donner plus de détail, elle ira les chercher à la source.

Sans attendre une minute de plus, la brune vint se placer derrière la personne qui selon elle, faisait l’objet des rumeurs. A vrai dire, il fallait bien avouer qu’elle n’avait l’air de fournir aucun effort vestimentaire. Elle-même s’en fichait bien mais, mais ce sweat informe et délavé accompagné de cheveux gras, elle n’était pas étonnée d’entendre de pareille chose derrière les bibliothèques. Elle se pencha plus ou moins au niveau de l’épaule de la jeune femme et renifla à plusieurs reprises.

- Eh mais … Je connais ça, attend, attend … Elle renifla à nouveau. C’est de la lavande mais ... Il y a autre chose ... Qu'est-ce que c'est, qu'est-ce que c'est ?

Maëllys se redressa et se tint le menton, pensive. Cela ne voulait dire qu’une chose, les deux autres filles ne disaient des choses que par méchanceté, ou répétait les choses comme des débiles, à voir donc.

- Il parait que tu ne te laves pas … C’est vrai ?

Demanda-t-elle de but en blanc avec un grand sourire en la contournant, elle et la table, pour venir lui faire face. Après tout, au moins si c’était un fait avéré, cela rendait son odeur encore plus curieuse. Elle parlait d’une voix rieuse et son interlocutrice pourrait croire qu’elle se moquait d’elle, mais c’était juste la situation qui la faisait rire. Après tout, ce n’est pas banal de se faire sentir.

Maëllys ricana. Elle observait la blonde avec un intérêt certain mais ce n’était visiblement pas réciproque, quel dommage, parce que cet échange lui plaisait drôlement bien. A vrai dire, la jeune hyène trépignait à l’idée de voir si son interlocutrice allait réellement lui mettre un pain ou pas. Ce ne serait pas la première fois que son côté abrupt lui vaut un allé simple pour l’infirmerie, ca risquait en plus, de ne pas être la dernière. En guise de réponse, elle haussa les épaules. Leur regard se croisèrent et pendant un instant, Maëllys cru sincèrement qu’elle allait se la prendre. Elle attendit, attendit encore mais le coup ne vint pas.

D’ailleurs, elle aurait dû s’en douter, quelqu’un qui sent la lavande ne s’abaisserait pas à une telle bassesse, après tout, la lavande est un symbole d’élégance et de grâce. Alors certes, son apparence ne colle pas, mais si l’attitude colle, ça convient à la botaniste. Le doute passé, la jeune femme dû se rendre compte que la brune ne partirait pas sans obtenir des réponses car, presqu’à contre cœur, elle lui apprit que l’autre odeur qu’elle avait repérée était du romarin.

- Ha ah ! Je le savais … bluffa-t-elle. Que tu n’allais pas frapper. Ça ne conviendrait pas à quelqu’un qui sent la lavande. Affirma-t-elle comme si c’était l’évidence. Après tout, c’est pour les gens élégants … Enfin, normalement.

Maëllys connaissait le romarin pour ses vertus aromatique dans la préparation de plat, mais comme odeur personnelle, cela ne l’aidait en rien, en revanche, avec toutes les lessives sur le marché, la lavande n’avait plus rien de rare, c’est pour ça qu’elle pouvait en parler bien plus librement. Même si elle n’insistait plus, elle vit que sa nouvelle compatriote perdait patience, surtout quand elle reprit la parole de manière excédée. Solveig donc. Elle ne connaissait pas encore son prénom mais l’apprenait avec plaisir. Son ton était sec, même cassant mais il en fallait plus pour que Maëllys en perde son aplomb.

Bien sûr, elle démentait la rumeur. La lavande et le romarin l’avait déjà un peu fait pour elle mais bon, pas de mystère de bonne odeur pour la petite D. Heureusement, la personne en face était largement assez intéressante pour qu’elle lui pose encore plus de question. Est-ce qu’elle le prendrait mal si elle lui proposait un relooking ? Cette idée passa furtivement et s’enfuit aussi rapidement qu’elle était apparue ; c’était une évidence.

- Un tableau comparatif ? Mais pourquoi tu veux comparer ces deux trucs vus qu’ils n’ont pas la même utilité ?

Après tout, on ne compare pas les torchons et les serviettes, si ?

- Bah lessive ou parfum, peu importe.

Après tout, elle venait étancher sa soif de curiosité, alors, une fois un sujet clos, elle n’allait pas perdre son temps à déblatérer sa science de botaniste à quelqu’un qui s’occupait visiblement d’autre chose. Maintenant, c’était le tableau qui intriguait la Hyène et la remarque de son interlocutrice sur le papier toilette était très juste. Mais les pénuries de PQ, c’est un truc inhérent à la vie de pensionnaire.

- Ah ça, c’est parce que certaines personnes ramènent les rouleaux dans leurs chambres pour pas devoir mettre ça dans le budget des courses, balança-t-elle sans vergogne.

Des débiles, à n’en point douter. Maëllys ne faisait pas partie de ses gens-là, mais les rumeurs allaient bon train alors forcément, elle était bien au courant de ce genre de détail. Mais ne dit-on pas qu’il n’y a pas de petit profit ? Dans un certain sens, elle peut comprendre. Mais c’est vrai que les mouchoirs, ça craint alors si ce tableau peu permettre d’ajouter un peu de confort, ne devrait-elle pas la laisser s’en charger sans la déranger ? … Naaaah.

- Tu as pris ces voleurs en compte dans ton calcul ? Poursuiva-t-elle pour voir jusqu’où la blonde pouvait aller dans son analyse.

Maëllys assumait pleinement son rôle de grosse forceuse. Mais visiblement, sa compagne atteignait les limites de son seuil de tolérance. Alors qu’elle s’apprêtait à reprendre la parole, elle se fit couper l’herbe sous le pied. Devant son commentaire, elle baissa les yeux sur son corps, elle le trouvait bien pourtant.

- Anorexique ? Tu trouves vraiment ? Pourtant je mange beaucoup … Enfin … Ah oui ! Je m’appelle Maëllys, tu peux m’appeler comme tu veux. C’est quoi ton petit nom ?

Maintenant qu’elle y songeait, quand elle-même était concentrée, elle en oubliait ses repas. Notamment dans les cours de spectacle ou dans ses recherches de biologiste. Comme pour contredire ses pensées profondes, son ventre se mit à gargouiller, de façon bruyante en plus. Ce qui n’eut pour effet que de la faire rire quand Solveig lui proposa de discuter sur le chemin vers la sacro-sainte nourriture.

- Nop. Avec plaisir même. T’as envie de manger quoi ? … J’espère qu’il y aura des crêpes.

Elle adore les crêpes.